L’universalisme et l'humanisme sont des valeurs fondamentales et nous voyons que c’est dans les moments de crise qu’elles sont le plus mises à l'épreuve.
Chaque mois, retrouvez le portrait d'un volontaire engagé qui nous raconte son action et son parcours.
Entretien avec Jean-Baptiste Houriez, engagé dans l'accueil des réfugiés en France et animateur du MoDem Paris Xe.
Peux-tu nous raconter comment l'accueil des réfugiés Afghans s'est organisé l'été dernier ?
En août 2021, à la suite des annonces unilatérales du retrait de l’armée américaine d'Afghanistan, les Talibans ont repris le pouvoir par la force. Commençant par les villes de province puis Kaboul le 15 août 2021. Ce coup de force a provoqué la fuite de millions de civils ayant participé ou juste sympathisé avec le régime soutenu par les Occidentaux. L’Iran et le Pakistan furent les premières destinations de refuge, mais pour les Kabouliens ou ceux qui avaient pu rejoindre la capitale, des ponts aériens ont été organisés par les armées et forces de sécurité des pays présents sur place. C’était le cas de la France. La mission nommée APAGAN consistait à permettre l'accueil en France des Afghans qui craignaient d’être persécutés en raison de leurs liens avec notre pays. Ils ont été traducteurs pour l’armée, employés à l’ambassade ou simplement fonctionnaires, journalistes, acteurs et actrices, militants des Droits de l’Homme, critiques inlassables de l’obscurantisme des Talibans.
Toutes les administrations de l’État se sont mobilisées. L’armée en premier lieu pour rapatrier les rescapés via Abu Dhabi. Le Quai d'Orsay, avec sa cellule de crise, tentait de localiser les personnes restées à Kaboul pour les ramener en France. Pour l’accueil des exilés, l’OFII dont c’est l’expertise, a été fortement mobilisée. L’Office français de l’Immigration et de l’Intégration, administration qui dépend du ministère de l'Intérieur et pour laquelle je travaille est habituée des missions de mise à l’abri. En partenariat avec les réseaux associatifs français (la Croix Rouge, France Terre d’Asile, ...), les exilés d’Afghanistan ont été enregistrés comme demandeurs d'asile, puis hébergés et accompagnés pour leur parcours d’intégration dans notre pays.
Quel est le sens de ton engagement en faveur des réfugiés ?
J’ai pris part à la mission APAGAN pour faire de la médiation culturelle, c’est-à-dire minimiser le choc du changement brutal d’environnement. Suite aux événements traumatiques que ces rescapés ont subis, l’arrivée dans un contexte profondément différent n’est pas simple. Ce n’est pas simple non plus pour les personnels en France, rarement exposés à la culture afghane. La compréhension mutuelle est le défi permanent de l’intégration.
Mon rôle est d'expliquer les démarches administrative, pas toujours claires. Tracer avec eux des perspectives de vie en France, entre opportunités et difficultés. Les informer de leurs droits et devoirs sur le territoire ; ou simplement pour les écouter, les rassurer, répondre à leurs questions, dissiper leurs doutes si nombreux après une telle épreuve.
Après plusieurs années à travailler dans le secteur privé, je me suis engagé avant tout par humanisme. L’universalisme et l'humanisme sont des valeurs fondamentales de notre mouvement et nous voyons que c’est dans les moments de crise qu’elles sont mises à l'épreuve. Plus que jamais, rappelons que nous sommes tous égaux, tous, sans distinction de religion, d’ethnie ou d’origine sociale. C’est pour que ces valeurs fondamentales soient respectées, sauvegardées et promues que je m’engage.
Le début de la campagne présidentielle a abordé le sujet des migrations. Quel regard portes-tu sur cette question ?
Je regrette que ce sujet profondément grave et humain fasse l'objet d'approximations grotesques à droite et à l'extrême droite, mélangeant migration légale et illégale, donnant lieu à des raccourcis équivoques entre terrorisme et demande d'asile. On nous répète que l’immigration coûte chère alors que l’OCDE affirme l'inverse. L'immigration, ce n'est pas pour ou contre. Acceptons la complexité du débat et ses multiples dimensions : économique, démographique et même démocratique.
A la tête de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Marielle de Sarnez avait publié un rapport en 2018 sur la réforme du droit des étrangers. Elle demandait alors à la représentation nationale de ne pas aborder ce thème de manière isolée. Reconnaissons que c'est une question structurelle du village-monde qu'est devenue notre planète, et que les migrations trouvent leurs racines dans des déséquilibres politique, climatique, économique, alimentaire…
Avec les Jeunes Démocrates, j’ai coordonné une "mission flash" pour une politique migratoire humaniste. Nous rendrons notre rapport dans les prochains jours. Il est fait constat de la politique actuelle, des consultations que nous avons menées avec des parlementaires français et européens et bien sûr de nos recommandations. Nous y abordons la nécessaire reforme de la réglementation européenne relative aux réfugiés ("Dublin 3"), de la décentralisation de l'agence en charge d'accorder l'asile (OFPRA), et d’autres sujets fondamentaux, faisant écho à la politique du gouvernement impulsée par le président dans le discours de la Sorbonne notamment.
[Jean-Baptiste Houriez s'exprime dans cette interview à titre personnel et n'engage pas son employeur].